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Scène X : Dans la prison en 1915. (1 version disponible)

Publié le mercredi 15 octobre 2008.


Chapitre 15.

Décor : Scène de droite avec un mur en pierre peint sur un rideau, masquant le reste du décor. Scène de gauche éteinte.

Personnages : Le héros moderne, le capitaine.

Contexte/Mise en scène : le capitaine évoque la tentative de suicide de Vernay et les sanctions prévues (la cour martiale). Il se montre magnanime vu les circonstances et le renvoie en première ligne dès la nuit suivante. Le héros resté seul réfléchit sur ce qui l’attend monologue.

Texte : p 176-177.

Scène X

Proposée par Christophe

La scène de 1915 est éclairée et celle de l’époque moderne dans le noir. Le caporal Vernay est dans une cellule assis contre un mur et la conscience de l’homme moderne est allongée dans un coin de la pièce. C’est la conscience de l’homme moderne qui anime le corps du caporal. Elle est face à lui… Le caporal tourne la tête de droite à gauche pour se rendre compte de l’endroit où il est. La conscience fait de même.

(Conscience)- Où est-ce qu’on est ? On n’est plus dans cette tranchée ? Et les autres ? Où sont-ils ?

Elle découvre le pansement sur la tête du caporal.

(Conscience)- Et ça qu’est-ce que c’est ?...Ça y est…j’y suis ! C’est la blessure qu’on a reçue à cause de ce caporal de malheur…Quel taré ! Il aurait pu nous faire tuer.

Le capitaine entre dans la cellule.

(Capitaine)- Ah, vous êtes sur pieds caporal Vernay ?

Vernay ne sais pas quoi dire.

(Capitaine)- Et vous ne saluez plus votre supérieur ?

Vernay s’exécute avec un salut à l’américaine.

(Capitaine)- Et qu’est-ce que c’est que cette façon de saluer ? Mmh… Enfin, j’imagine que la balle boche qui vous a glissé sur le crâne y est pour quelque chose.

Le capitaine commence à déambuler dans la pièce sans plus regarder Vernay. Il a les mains dans le dos et parfois il s’arrête devant la fenêtre de la cellule pour regarder au dehors avant de reprendre son monologue.

(Capitaine) Caporal Vernay, vous ne me facilitez pas la tâche. Depuis que vous êtes dans cette compagnie vous vous signalez par vos coups de tête et votre mauvaise humeur…A plusieurs reprises j’ai choisi de fermer les yeux eu égard à votre vaillance au feu. Mais aujourd’hui ce n’est plus possible. Que vont penser vos hommes si je passe encore l’éponge ? Surtout dans le contexte actuel…L’offensive a commencé depuis un mois, depuis un mois sans répit véritable et sans avancée non plus.
- Et avec quelles pertes, Seigneur ! C’est un miracle que les hommes acceptent encore d’y retourner. Les boches sont bien enterrés, vous pouvez me croire. A chaque montée en ligne, nos effectifs fondent de façon prodigieuse… et pour quoi ? Pour des gains dérisoires. Je n’en reviens pas moi-même de voir nos hommes usés jusqu’à la trame et remonter malgré tout sans plus de récriminations. Mais cela ne durera pas toujours. Surtout si nous nous mettons à vaciller, nous qui les commandons.

Il semble se souvenir de l’existence de Vernay et lui parle en face avec conviction.

- Il faut tenir les hommes, Vernay, les tenir à tout prix et leur montrer l’exemple ! Puis, il reprend sa déambulation.
- Je pense, voyez vous, qu’avec un autre que moi, c’était le conseil de guerre qui vous attendait au sortir de cette pièce, et au-delà, qui sait ? Il s’arrête un instant.
- La prison, le peloton peut-être. On fusille assez souvent ces jours, vous savez… pour l’exemple. Il soupire et vient se planter devant Vernay.
- Caporal Vernay, je ne suis pas un monstre. Je suis sensible au drame qui vous accable. Je n’ai pas oublié non plus votre conduite le 9 mai dernier. Il n’y aura pas de prison, pas de conseil de guerre. Vous repartirez cette nuit en première ligne tandis que le régiment restera au repos…Ce sera suffisant. En attendant notre retour, vous rejoindrez une compagnie du 97ème dans le secteur du Cabaret Rouge. Il est sur le point de quitter la pièce. Puis il se ravise et lance encore :
- Tâchez de mesurer la chance que je vous donne. Au prochain écart de votre part, vous y aurez droit, et je ne lèverai plus le petit doigt pour vous.

Le capitaine quitte la pièce. Le caporal est seul.

(Vernay)- Mais qu’est-ce que je fous ici ? Qu’est-ce que je fous dans la peau de ce caporal à la con…Sa femme meurt, il veut se faire descendre par les boches, il saute en dehors de la tranchée et à l’arrivée c’est moi qu’on renvoie en première ligne ! Moi ! Je ne sais même pas tenir un fusil ! J’y connais rien à cette guerre…Je ne ferai pas un pas là bas, que je serai déjà mort…

(La conscience) -Qu’est-ce qu’on a fait pour mériter ça ? On est coupable de quoi pour devoir vivre un truc pareil ?

( Vernay) - Il faut que je me tire d’ici ! Il faut que je regagne mon époque !…

(La concience)- Mais comment ? C’est complètement dingue…Comment on fait pour voyager dans le temps ?

Vernay crie vers le plafond…

(Vernay)- Caroline, Yann ! ne m’oubliez pas ! Je ne veux pas crever tout seul ici !



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