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Scène V : Retour en 1915 blessure au doigt. (2 versions disponibles)

Publié le mercredi 15 octobre 2008.


Chapitre 8.

Décor : Scène de gauche éteinte. Scène de droite allumée.

Personnages : Bonpain, Vernay.

Contexte/Mise en scène : le caporal Vernay et Bonpain sont à deux ils sont volontaires pour récupérer un homme parti tracer les plans du secteur. Ils vont passer leurs buste au dessus du talus et récupérer le soldat. Ils le fouillent et découvrent les plans dont Bonpain lit le titre : « Bois de Carency, juin 1915… ». Au cours du sauvetage, le caporal est touché au doigt. Pour les deux hommes c’est sans importance.

Texte : Un vrai texte parlé dans lequel on doit saisir les caractères des deux personnages (se baser sur le chapitre 8 : dialogues des pages 85-86-87-88).

Version proposée par Béatrice

Le caporal Vernay et Bonpain sont à deux. Ils sont volontaires pour récupérer un homme parti tracer des plans du secteur ( peut-être la voix off doit-elle le dire ?) Ils sont dans des tranchées à moitié écroulées et s’immobilisent. L’espace autour d’eux est encombré de corps inertes. Les deux hommes franchissent un obstacle de barbelé et on entend un claquement sec, synonyme qu’on leur a tiré dessus (à voir comment représenter cet incident).

BONPAIN : Les tantes ! I’s nous z’yeutent.

VERNAY : Ne traînons pas ! Le coin est malsain.

BONPAIN : Tu l’as dit, ici, en plein jour, faut être dingo ! Y a qu’nous deux pour pas câner. Comme d’hab, c’est toujours les mêmes qui s’y vont pour c’genre de mission.

VERNAY, montrant un corps étendu un peu plus loin sur le talus : Arrête de râler et regarde là-bas. C’est lui.

BONPAIN : Misère ! T’as vu la paroi du boyau, caporal ? Elle a été ouverte par un obus. C’est en passant devant qu’il s’est fait moucher.

VERNAY : Aide-moi à le récupérer, vite.

Les deux hommes passent leur buste au-dessus du talus et une rafale de balles les frôlent, touche le cadavre qui tressaille. Le caporal Vernay et Bonpain se tassent dans leur tranchée. Puis le calme revient.

BONPAIN : Eh caporal ! Vise un peu ta main.

VERNAY : Merde ! Ce con-là m’a coupé le bout du petit doigt !

Après une pause et dans un sourire : Alors, tu crois que c’est ce qu’on appelle une fine blessure ?

BONPAIN : Pas de chance, caporal, tu repasseras !

VERNAY, sort des pansements de sa musette et se bande le doigt en grimaçant. Se retournant vers Bonpain et désignant le corps du soldat :

Allez, récupérons-le.

De nouveau les deux hommes se hissent au-dessus du talus et récupère le soldat. Vernay récupère la plaque d’un coup sec et Bonpain commence à fouiller le cadavre.

BONPAIN : Un livre de prières... Y a pas dû l’prier assez fort son Dieu pour qu’il le laisse ainsi creuver.

VERNAY : Ferme-la et cherche les plans.

BONPAIN : Tiens caporal ! Des feuilles à cigarettes ! J’y prends. Il n’en a plus besoin là où il est maintenant.

VERNAY, vidant successivement les poches du mort et en mettant les effets personnels dans ses propres poches : Des lettres... des photos... un carnet... Feuillette un peu le carnet avant de s’immobiliser. Nom de... c’est ça ! Les plans sont à l’intérieur.

BONPAIN : Tant mieux ! Maintenant, fichons le camp d’ici. Saluant le mort.

Salut vieux frère. Il s’éloigne, laissant le caporal seul un instant. VERNAY, regarde le soldat mort avec désolation et mettant le carnet dans sa poche : Tu n’y es pour rien...

BONPAIN, revenant en arrière et en marmonnant : Mais qu’est-ce que tu fous ? Bouge-toi caporal, ce salaud d’boche est tout près.

VERNAY : Il doit être juste là, derrière, même pas à vingt mètres.

BONPAIN, posant une main sur sa musette : Et si on lui fermait sa sale gueule ? Sortant une grenade et la soupesant : Et des boches encore !

VERNAY, prenant à son tour une grenade : Bon ! D’accord, on va envoyer sur le râble à César ce qui lui appartient...

Ils s’écartent l’un de l’autre de quelques pas la grenade à la main, puis s’accroupissent face au fusil qu’ils devinent braqués sur eux. Signal de Vernay. Ils arrachent le bouchon de mise à feu, se relèvent soudain et lancent le projectile de toutes leurs forces avant de s’éloigner rapidement. Deux coups de feu claquent, puis deux explosions.

BONPAIN : A la vôtre les deux boches ! Ils s’arrêtent pour reprendre leur souffle.

VERNAY : Ici, on est mieux défilé. Sortant le carnet de sa poche : Et on a les plans.

BONPAIN : C’est ça son carnet ? C’est égal, c’est moche de faire tuer un type pour quelques coups de crayon.

VERNAY, comme se parlant à lui-même : C’est bien ça, Bois de Carency, le 7 juin 1915.

Scène V

Proposée par Christophe Rouviller

Vernay et Bonpain sont seuls dans la tranchée. Ils sont volontaires pour retrouver un soldat qui est parti tracer un relevé du secteur. Ils arrivent du bord gauche très lentement, à quatre pattes.

Bonpain : Attention caporal, y’ a encore des fils.

Bonpain ouvre la voie. Courbé, avec précaution, il soulève un chevalet garni de fils de fer.

Un claquement sec

Bonpain :Les tantes ! souffle Bonpain en s’adossant à la paroi. I’s nous z’yeutent.

Vernay : Ne traînons pas ! Le coin n’est pas sûr.

B : Tu l’as dit, ici, en plein jour, faut être dingo ! Y a qu’nous deux pour pas câner.

V : Là , regarde !

B : Misère ! Il y est !

Devant eux, derrière un gabion un corps est allongé.

B : Regarde, la paroi du boyau, lui chuchote Bonpain. Elle a été ouverte par un obus. C’est en passant devant qu’il s’est fait moucher…

Bonpain s’est assis, il sort une cigarette. Vernay a déposé son fusil et il rampe en direction du corps.

B : Fais gaffe !

V : Te fais pas de cheveu va…

Vernay atteint le corps qu’il déplace.

B : Alors, il y est ?

V : Un peu !…Une balle retournée, il n’a plus de visage. Tu parles d’une mocherie !

Vernay s’active un moment et fouille le corps du mort. Bonpain tire plusieurs fois sur sa cigarette en regardant de droite à gauche, inquiet.

B : Qu’est–ce que tu fous ? C’est malsain ici ! Si les boches dans leur saucisse nous repèrent, on va se prendre une volée d’obus dans les cinq secondes !

V : Voilà, j’ai son portefeuille et son carnet.

B : T’as pris sa plaque ?

V : Ouais, elle est dans ma poche. Il regarde un instant le soldat couché et lui dit : Adieu pauvre frère…

Vernay revient en se relevant un peu plus. Un détonation retentit et il se jette à terre aux pieds de Bonpain.

B : Il commence à devenir fatigant Fritz !

Vernay s’assoit à côté de lui et regarde ce qu’il a rapporté.

Bonpain se relève un peu en essayant de situer le tireur.

B : Salaud va, il doit être à même pas vingt mètres…

V : T’occupe ! Vise un peu.

B : Son portefeuille…Ses lettres…La photo de sa femme…et là celle de ses gosses…Ah non, c’est trop.

V : Tu veux ses cigarettes ?

Bonpain ne répond pas, perdu dans la contemplation des photos.

V : Tiens, v’là ses dessins. Oh Bonpain, regarde !…C’est le dessin d’aujourd’hui. Tu vois, il a écrit Bois de Carency, le 7 juin 1915.

B : Et ça qu’est ce que c’est ? C’est quoi ces lignes ? C’est les tranchées ?

V : Ouais, c’est leur nouveau réseau. Ils ont bien creusé les vaches ! Regarde, c’est le coin du Cabaret Rouge. Avec ces renseignements là notre artillerie va pouvoir tout leur foutre en l’air. Ça vaut de l’or…

B : Ouais, c’est égal… C’est moche de faire tuer un pauvre type pour deux ou trois coups de crayon.

Deux coups de feu retentissent.

B : Et ce fumier là ! On va le laisser attiger tout le monde comme ça sans rien dire ?

V : Non, on va lui fermer sa sale gueule…Regarde…Il y a de quoi…et c’est des boches encore ! Vernay ouvre une musette garnie de grenades allemandes.

V : On va renvoyer à César ce qui lui appartient.

En silence, mesurant leurs gestes, ils s’écartent l’un de l’autre de quelques pas la grenade à la main, puis ils s’accroupissent et, en se relevant soudain, ils lancent leurs projectiles au dessus du parapet.

Les deux hommes se jettent au sol.

Explosion.

B : A la tienne !... J’crois qu’on lui en a bouché un coin à l’ami Fritz. Ah ! Ah ! Ah !

V : Allez on les met !

B : Oh caporal ! Vise un peu ta main !

Vernay regarde son doigt blessé.

B : Le salaud, même avec une grenade dans les dents il tire précis comme à la foire.

Vernay contemple encore son doigt blessé avant de l’envelopper dans un pansement.

V : Tu crois que c’est ce qu’on appelle la fine blessure ?

B : Tu r’passeras caporal, tu resteras avec nous. Bonpain l’aide à mettre son pansement.

V : Allez, faut faire vinaigre parce que si les artilleurs s’y mettent c’est pas un bout de doigt qu’on va laisser dans ce coin pourri !

Les deux hommes ramassent leurs affaires et s’en vont, courbés en courant.



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