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Scène IX : Retour en 2005. (1 version disponible)

Publié le mercredi 15 octobre 2008.


Chapitre 23.

Personnages : Yann, Caroline, le héros, un figurant sous le drap.

Décor : Scène de gauche allumée. Scène de droite éteinte.

Contexte/Mise en scène : Yann et Caroline sont penchés sur la forme du héros (dissimulé !) sous un drap dans un lit. La conscience du héros échappée à 1915 revient en 2005 et découvre la blessure sur son propre front. Il interpelle Caroline et Yann qui ne peuvent lui répondre mais semblent l’entendre et finissent par se pencher sur lui pour constater la blessure. Panique à nouveau. La conscience dans la pièce va et vient en dialoguant avec elle-même afin de trouver une idée pour s’en sortir. Elle incite Yann à ouvrir l’ordinateur. C’est à cette occasion qu’il découvre la mort de Vernay datée du 16 juin 1915 et l’image de l’église d’Ablain de nos jours. Puis retour vers 1915.

Texte : p 205 à 209, cette partie peut être drôle.

Scène IX

Version proposée par Christophe.

La lumière revient dans le chalet. Yann et Caroline sont en train de discuter sur la conduite à suivre. Le héros est dissimulé sous une couverture. La conscience fait son apparition dans le chalet. Elle est heureuse et soulagée…

(Conscience) – Eh ben, j’ai bien cru ne jamais revenir ici… C’est fou : aussitôt ce soldat tombé, c’est comme si le lien qui m’unissait à lui s’était brisé. Oh ! comme ça fait du bien de se retrouver dans son univers familier !

La discussion de Yann et de Caroline l’interrompt. Elle se tourne vers eux tout en s’effaçant de la scène. Caroline est paniquée et secoue Yann.

(Caroline) – Yann, il faut qu’on fasse quelque chose et vite !

(Yann) – Calme-toi Caroline. Tu veux bien ? Gardons la tête froide.

(Caroline) – Mais tu n’as pas l’air de te rendre compte ! C’est sûrement grave ce qu’il a…Il est tombé d’un coup, comme ça sans raison. Et si c’était un AVC ?

(Yann)- Attends, c’est peut-être juste une chute de tension. D’accord ? Il n’a pas dormi de la nuit…Et ce qu’il a vu ces dernières heures a dû bien le secouer…

(Caroline) – Mais son doigt ! Son doigt Yann ! C’est pas qu’une chute de tension…Qu’est-ce qu’il lui est arrivé à son doigt ?

(Yann)- J’en sais rien…Caroline…Je ne sais pas…Ecoute…Il respire normalement. On l’a mis au chaud. Ça a l’air d’aller pour le moment. Toi tu veilles sur lui et moi je descends au hameau. Je vais chercher du secours.

(Caroline) – T’es sûr que le téléphone ne marche pas ? T’as encore essayé ?

(Yann)- Y’ a rien qui passe…Y’a pas de courant… Je vais faire le plus vite possible. Je prends mes raquettes et j’y vais...

(Caroline) – ça va durer des heures avant qu’on vienne le secourir…Et si c’était vraiment grave ?

(Yann) – Fais moi confiance Caroline, je vais aller le plus vite possible. Allez, ne perdons pas de temps !

Caroline aide Yann à s’équiper de son anorak et de ses raquettes…Pendant ce temps la conscience s’est approchée du héros allongé sous sa couverture.

(Conscience) – Voilà donc pourquoi je suis toujours là à errer…Il a encore perdu conscience…Mais non ! Tu ne m’as pas perdue, je suis là ! …Allez ! On se réveille…On reprend conscience ! Ouh ouh ! Tu vas me reprendre oui !

Elle s’approche de lui et gesticule pour attirer son attention.

(Conscience) – Mais qu’est-ce qu’il a à la fin…C’est pourtant vrai qu’il n’a pas bonne mine…Mais…Ce n’est pas possible ! Là, à son front…Cette blessure ! C’est celle du soldat ! Il porte la blessure du caporal Vernay à présent ! Il saigne lui aussi !

(Caroline) – Tu veux que je te prépare un thé ?

(Yann)- D’accord, mais fais vite…

La conscience s’approche de Yann et de Caroline et prend le public à témoin. Elle est scandalisée devant leur indifférence. Puis elle prend Yann à partie.

(Conscience) – Et ces deux-là qui n’ont rien vu ! Et qui parle de faire du thé ! Oh ! Eh ! Ouvrez donc les yeux ! Ne nous laissez pas comme ça ! Venez voir ! C’est terrible, ils n’entendent rien…La voix de la conscience ! tu parles ! Ah mais ça ne se passera pas comme ça ! Et lui là qui parle de télépathie toutes les deux phrases… Tu n’es même pas fichu de m’entendre ! Frimeur va !

(Yann)- Comment ça frimeur ?

Yann penché sur ses raquettes relève brusquement la tête et pense que c’est Caroline qui lui parle ainsi.

(Caroline) – Quoi ? qu’est-ce que tu dis ?

Yann n’enchaîne pas mais est troublé. Il regarde autour de lui.

(Yann)- Non, j’avais cru…

La conscience se réjouit et saute sur place. Puis elle sollicite Yann mais en lui parlant doucement.

(La conscience)- Il m’entend ! Il m’entend ! Yann, viens vite voir ton ami…Il saigne, viens voir !

(Yann)- Tu n’oublies pas le sucre Caroline ?

La conscience entre à nouveau en colère.

(La conscience)- Le sucre ? Mais Yann nom d’un chien ! Secoue-toi et viens voir ton ami ! Il est blessé ! Yann lève –toi !

Yann se lève précipitamment…et reste interdit.

(Yann)- T’as entendu ?

(Caroline) – Quoi ?

Yann ne répond plus mais il s’avance lentement vers son ami allongé.

(Yann)- ….

Caroline le suit en le regardant avec inquiétude.

(Caroline) – Mais qu’est-ce que tu as ?

Yann se penche et découvre la blessure. Il crie appelle Caroline et aussitôt veut lui barrer le passage.

(Yann)- Merde ! Caroline, viens vite voir ! …Euh, non, ne viens pas. Ne regarde pas !

(La conscience)- A tout de même…

Caroline force le passage et se précipite sur le héros en proie à une grande panique. (Caroline)- Mais qu’est-ce qu’il a ! Ce sang, tout ce sang ! Qu’est-ce que ça veut dire ? Je t’avais dit que c’était grave !

Yann, la contient et la force à reculer.

(Yann)- Ce n’est pas dû à son malaise. Regarde, on dirait qu’il a une coupure au cuir chevelu. Oui, c’est bien ça. Ça saigne beaucoup mais c’est superficiel…

(Caroline) – Mais c’est quoi ? ça vient d’où ?

Yann relève Caroline et essaie de lui expliquer avec calme.

(Yann)- Je crois qu’il avait raison. Quand ce caporal se blesse là-bas, c’est aussi sur son corps que les blessures apparaissent.

Caroline est effondrée et tombe assise au sol, la tête entre les mains.

(Caroline) – C’est pas possible, c’est pas possible. Qu’est-ce qui va lui arriver ?

Yann est à côté d’elle et tente de l’apaiser.

(Yann)- Calme –toi, calme-toi. On va trouver une solution…

La conscience debout dans un coin de la scène se parle à elle-même.

(La conscience)- Oui mais laquelle ? La première chose ce serait de savoir ce qui va arriver à ce caporal…

Yann vient d’entendre la voix de la conscience sans la localiser, il répond :

(Yann)- Oui tu as raison…

Caroline et la conscience sont interloquée (pas pour la même raison).

(Caroline) – Pardon ?

(La conscience)- Pardon ?

(Yann)- La première chose ce serait de savoir ce qui va, ou plutôt ce qui est arrivé au caporal.

La conscience dans à nouveau.

(La conscience)- ça y est il m’entend ! Il m’entend !

(Caroline) – Mais comment faire ?

(Yann)- Si il est mort, c’est inscrit quelque part... (Caroline) – Mais où ?

La conscience se mêle à la conversation mais Yann et Caroline ne la voient pas et ne la localise pas.

(La conscience)- Au ministère des armées à Paris.

Quand Yann reprend les idées de la conscience, il s’exprime avec les yeux dans le vague comme s’il avait une révélation…

(Yann)- Au ministère des armées à Paris.

(Caroline)- C’est malin, ça ne nous avance pas…

(La conscience)- Regarde sur internet !

Yann)- Regardons sur internet.

(Caroline) – Mais y a pas de courant.

Moment décalé…La conscience s’adresse au Tout Puissant…(Sans son aide on ne va pas pouvoir sans sortir ! )…Les mains jointes.

(La conscience)- Oh oui mais non ! Là ça fait vraiment beaucoup…S’’il vous plaît…Juste une fois, une seule fois…Un tout petit miracle….Merci ! Une lampe s’allume dans le chalet…La conscience prend la tête de Yann entre ses deux mains et la fait tourner en direction de cette lumière qui vient d’apparaître.

(Yann)- Mais si ! Regarde ! Vite mon ordi

Yann ouvre son ordinateur…Caroline se presse à côté de lui.

(Caroline)-Vite, vite !

Yann est content quand tout est prêt puis il ne sait quoi faire. Il pose alors la question en regardant un peu partout dans la pièce comme si il s’adressait à quelqu’un d’invisible qu’il ne localise pas.

(Yann)- Voilà ! Euh…Qu’est-ce que je tape ?

(Caroline)- Je ne sais pas…

(Conscience)- Tape « morts pour la France ! »

(Yann)- Ah oui ! C’est bien ça : « Morts pour la France ! »

(Caroline)- T’es sûr que ça va Yann ?

La conscience répond à Caroline avec un peu d’agacement.

(Conscience)- Mais oui il va très bien ! Alors ?

(Yann)- Bon j’ai un site où il faut entrer le nom du « mort pour la France ».

(Caroline)- Mais on ne sait même pas comment il s’appelle !

(Conscience)- Mais si il s’appelle Vernay…C’est le caporal Vernay !

Yann tape aussitôt. Caroline lit sur l’écran…

(Caroline)- Vernay ! C’est quoi ce nom ?

(Conscience)- Là ! C’est sa fiche !

(Yann)- Regarde Caroline. C’est la fiche numérisée du caporal Vernay.

(Caroline)- Attends c’est la fiche du caporal…Mais…

Yann ne l’entend pas. Il lit avec concentration.

(Yann)- Caporal Paul Eugène Marie VERNAY, 159ème régiment d’infanterie...Porté disparu à Souchez dans le Pas-de-Calais… (Conscience)- …le 16 juin 1915 !

(Caroline)- ça veut dire quoi « porté disparu » ?

La scène se fige…et la scène de 1915 se rallume…Le caporal Vernay s’éveille lentement dans sa prison, un pansement à la tête. La conscience est happée vers 1915…

(Conscience)- Mais qu’est-ce qui se passe ? Oh non, ça recommence. C’est ce caporal de malheur qui se réveille. Il m’attire à lui ! Je ne veux ne pas revenir ! Il faut que j’en sache plus…Je dois revenir dans le chalet de Yann ! Maintenant !

Elle parvient à réintégrer le séjour de Yann…et la scène redevient vivante.

(Conscience)- Ouf ! Vite, je sens que je ne vais pas rester longtemps ici…

(Caroline)- ça veut dire quoi « porté disparu » ? Il va mourir ? Yann merde réponds…Fais quelque chose !

(Yann)- J’veux bien ! Mais quoi !

(Conscience)- Tape Souchez !

(Yann)- Souchez ?

Caroline)- Mais Yann, tu parles tout seul !

(Conscience)- Euh non ! 16 juin 1915 !

(Yann)- T’es sûr ?

Caroline et la conscience en chœur.

(Caroline)- Mais oui !

(Conscience)- Mais oui !

(Yann)- 16 juin 1915…

La conscience est frénétique…Elle bouscule Yann qui ne la sent pas mais qui lui obéit. Tout à coup la conscience est à nouveau happée vers 1915. La scène se rallume et le caporal se réveille et s’assoit.

(Conscience)- Là dans ce site…On parle de la bataille d’Artois…Allez clique ! Clique ! Oh non ! Il m’attire à nouveau ! Cette fois c’est pour de bon !

(Caroline)- C’est quoi le 16 juin 1915 ?

(Yann)- Ils parlent d’une offensive ce jour-là…

(Conscience)- Une offensive ! Il faut que je sache !

Le caporal retombe un instant dans le sommeil. La conscience revient.

(Yann)- Regarde il y a une photo du champ de bataille aujourd’hui. Tu vois cette église en ruine…c’est tout ce qui reste comme trace des combats à présent.

La conscience a vu l’image à l’écran mais le caporal s’étire cette fois. Il se réveille tout à fait. Elle est forcée de regagner 1915.

(Conscience)- Mais c’est où ? C’est comment le nom de cette église ? Yann réponds-moi ! Il faut que je sache où ça se passe si je veux sauver la peau de ce caporal !... Non ! Je ne veux pas y retourner ! Je ne veux pas aller là-bas !



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